CETTE RUBRIQUE A POUR BUTS DE
RASSEMBLER DES SOURCES OU DE PRESENTER DES ETUDES SUR DES
THEMES AYANT RAPPORT AVEC LES ARMEES EN MARCHE
SOURCES PRIMAIRES
ETUDES
Chaussures à semelles cloutées, est-ce historique oui ou non ?
La chaussée (bibliographie "Les Voies romaines" Raymond Chevallier éditions Picard).
Le convoi (P. Rudrauf)
Le réseau routier antique en forêt de Rambouillet (Yvelines)
Intégralité de l'article
rédigé par Gilles Becq, dans la revue "Connaître
les Yvelines" éditée par le conseil général au second trimestre 1989
L'équipement du légionnaire (ou fantassin lourd) dans l'armée romaine en marche (P. Rudrauf)
Avant et pendant la marche, les apports des missions de "renseignements" et des missions "d'éclaireurs" (P. Rudrauf)
"Double victoire à Azincourt" ou la
performance de l'armée Anglaise dans sa marche de seize jours
jusqu'à la bataille - octobre 1415 (P. Rudrauf)
La marche de Jeanne d'Arc de "La Chapelle" à la porte Saint-Honoré, en la journée du 8 septembre 1429 - d'après les études de H. Couget (1925) et E. Eude (1916)
Le port du bouclier en marche -expérimentations (P. Rudrauf)
Un épisode de la guerre de 100 ans
Une armée rejoint des châteaux de montagnes
Une armée Mycénienne en marche
REALISATIONS
Une tente de protection individuelle et portable
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SOURCES PRIMAIRES
CICERON (-106 à -43) concernant le paquetage du soldat
Vous voyez que de peine, que de
fatigues dans ces déplacements (...) Le soldat doit porter des
vivres pour plus de quinze jours, porter tout ce qui doit lui servir,
porter un pieu pour la palissade. Le casque, le bouclier,
l'épée, nos soldats ne les comptent pas plus en poids que
leurs épaules, leurs bras, leurs mains -ne dit-on pas que les
armes sont les membres du soldat ?
Représentation
de la légion en marche "avec armes et bagages" - colonne Trajane
érigée en 113 après J.C.
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VEGECE (Vème siècle ?) - traité de l'Art Militaire (traduit par Victor Devalay)
Rédigé apparemment sous l'empereur Valentinien III à sa demande
et dans le but de rassembler les préceptes et pratiques
militaires qui ont fait la force des armées et dont l'usage s'est
progressivement perdu.
Livre 1 chapitre 9 : Pas militaire, course, saut.
""...Au début des exercices vient
l'apprentissage du pas militaire. Rien de plus important, en route ou
en bataille, que de faire observer à tous les soldats une marche
uniforme.
Le seul moyen d'atteindre ce
résultat, c'est de les habituer assidûment à des
promenades où à la vitesse sera jointe la
régularité. Une armée divisée et sans ordre
s'expose à de grands risques de la part de l'ennemi. Au pas
militaire, on fera vingt milles en cinq heures (29 600 mètres),
dans la saison d'été ; mais au pas allongé, qui
est le plus rapide, la distance à parcourir, dans le même
espace de temps, sera de vingt quatre milles (35 520 mètres) ..."".
Livre 1 chapitre 19 : Charge du soldat
""...Porter à dos un poids
d'environ soixante livres, en marchant au pas militaire, doit
être l'exercice fréquent du conscrit qui dans des
expéditions pénibles, sera tenu de se charger de ses
vivres et de ses armes. Ne croyons pas que ce soit là une chose
difficile avec un peu d'usage ; car l'habitude rend tout infiniment
aisé. Jadis nos soldats le faisait couramment""...
Livre 1 chapitre 27 : Promenade militaire.
""...Une vieille coutume,
sanctionnée par les décrets des empereurs Auguste et
Adrien, a voulu que, trois fois par mois, cavaliers et fantassins
fussent dressés à la promenade : c'est le terme qui
désigne ce genre d'exercice. Les fantassins avec armes et
baguages avaient ordre de parcourir, au pas militaire, une distance de
dix milles (14 800 mètres)et de revenir au camp, en ayant soin
de faire à pleine course, une partie du chemin ... Cavaliers et
fantassins n'agissaient pas seulement en plaine, il leur fallait encore
gravir et descendre des pentes escarpées, afin qu'aucun accident
de terrain, aucun obstacle de quelque nature qu'il fût ne vint
surprendre, au moment du combat, des hommes familiarisés
d'avance avec tout ce qui constitue d'excellents soldats""...
Livre 3 chapitre 11 :Précautions a prendre le jour d'une bataille rangée.
""...On se gardera de mettre en ligne, pour
une action générale, des hommes fatigués d'une
longue route et des chevaux exténués par la course. La
lassitude des marches enlève au combattant presque toute son
énergie : que faire quand on accourt sur le terrain haletant ?
Les anciens ont évité cet inconvénient ; mais dans
le siècle dernier, et même de nos jours, des
généraux romains, dont l'impéritie, pour ne pas
dire plus, n'en tint pas compte, on perdu leurs armées. Certes,
les conditions de lutte sont loin d'être égales entre des
troupes abattues, essouflées, ruisselantes de sueur et d'autres
fraiches, vigoureuses, pleine d'élan""...
En résumé :
Ces textes sont extrèmements instructifs. En ce qui concerne le
déplacement des armées, Végèce explique que
des fantassins régulièrement entrainés parcourent
sans grandes difficultés des distances de trente
kilomètres dans la journée ceci avec leur
équipement complet (que l'on peu évaluer à 35
kilogrammes).
Il précise cependant qu'amener au combat ces hommes directement
après la marche serait un erreur mais qu'il faut leur laisser le
temps de la récupération.
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Jean FROISSART (vers 1337 Valenciennes en Hainaut - après 1404) - Chroniques (extrait)
Vers l'âge de 24 ans, Jean-Froissart devient l'historien
officiel à la cour de Philippa de Hainaut (l'épouse
d'Edouard III d'Angleterre) ceci de 1361 à 1369. Il a
écrit quatre livres de chroniques composées entre 1370 et
1400, lesquelles relatent les épisodes de la guerre de 100 ans
(de 1325 à 1400) vus du côté Anglais.
Texte :
""... Vous devés savoir que li seigneur d'Engleterre et li riche
homme menoient sus leurs chars tentes, pavillons, forges, moullins et
fours pour forgier fiers de chevaux et autre cose, pour mieure bled et
pain quire, s'il trouvaissent les forges, les moullins et les fours
brisiés, et pour chou estoffer, il menaient bien VIIIm chars,
tous atellés de IIII fors cevaux qu'il avoeint mis hors
d'Engleterre ; et avoient sus ces kars pluisseurs nacelles et
batelès fais si soutielment de quir boulit, que troy homme se
pooient bien dedens aidier et nagier parmy un escaukt ou un vivier, con
grant qu'il fuist, et celi peschier et laissier hors, si lors plaisoit.
De duoy il eurent grant aise et plenté de poissons en quaremme,
voirs tout li seigneur et gens d'estat, mès les communes gens se
passoient de ce qu'ils trouvoient.
Et avoecq chou, li roys avoit bien pour lui XXX fauconniers à
cheval, chargiés d'oisiaux, et bien LX couples de fors kiens et
otant de lévriers, dont il alloit chacun jour ou en cache ou en
rivière, enssi qu'il li plaisoit.
Et si y avoit pluisseurs des seigneurs et des rices hommes qui avoient
lors chiens et lors oisiaux ossi bien comme li roys, et estoit li grant
host toudis partis en III parties, et chevauçoit chacun hos par
lui.
Et avoit chacune host par lui une lieuwe en sus de l'autre, dont li
prinches de galles en avoit l'un, li dus de Lancastre l'autre, et li
roys le tierche et toutte le plus grant ; et enssi se maintint li
mouvans de callais jusques adont qu'il vint devant Chartres...""
Traduction - P. Rudrauf :
Il faut que vous sachiez que le roi
d'Angleterre et ses barons transportaient sur leurs chariots des
tentes, des pavillons, des forges, des meules et des fours pour forger
les fers des chevaux ou d'autres objets, pour moudre le blé, et
cuire le pain au cas ou les forges, les moulins et les fours qu'ils
rencontreraient sur leur route seraient détruits et hors
d'usage. Et pour tout emporter ils déplacaient grand nombre de
chariots attelés chacun à quatre forts chevaux venus
d'Angleterre ; et ils avaient sur ces chariots plusieurs embarcations
faites si solidement de cuir bouilli, que trois hommes pouvaient se
tenir à l'intérieur et naviguer sur une rivière ou
un lac, aussi grand qu'ils soient, ce qui permettait de pêcher si
on le désirait.
Et c'est ce qu'ils eurent à
apprécier car cela leur procura quantité de poissons en
période de jeune. Les seigneurs, notables et gens simples
profitèrent de ces trouvailles.
Avec cela, le roi avait avec lui
trente fauconniers à cheval, chargés d'oiseaux et bien
soixante couples de forts chiens et autant de lévriers avec
lesquels il allait tous les jours à l'affut ou en
rivière, comme il lui plaisait.
Il y avait plusieurs seigneurs et
riches hommes qui avaient avec eux leurs chiens et leurs oiseaux tout
comme le roi, et le grand convoi de l'armée était reparti
en trois corps évoluant séparément.
Chacun des corps de l'armée
était distant de l'autre de une lieue. Dans l'un
était le prince de Galles, dans l'autre le duc de Lancastre et
dans le troisième et le plus grand était le roi. C'est
ainsi que le convoi s'est déplacé de Calais
jusqu'à son arrivée à Chartres.
A retenir de ce texte :
Il s'agit d'une armée royale du XIVème siècle en
déplacement entre Calais et Chartres. Le convoi est important et
lourdement chargé et il tient à préserver
absolument son autonomie (on part avec des forges, des meules à
moudre, des fours). La présence des embarcations permettant la
pêche est une curiosité.
Le roi et la noblesse d'Angleterre se déplacent avec leurs
chiens et leurs oiseaux de chasse, ce qui semble leur être
indispensable même en campagne militaire. Le convoi et
réparti en trois groupes distants de plus de deux
kilomètres les uns des autres (si il s'agit de lieues
gauloises) ce qui n'est pas choquant (d'autres
exemples connus) car cela facilite la gestion du convoi et la
sécurité notamment.
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ETUDES
Les chaussures à semelles cloutées, est-ce historique, qui, quand, où ?
Je propose de mettre ici les informations que j'ai trouvées sur
le sujet afin de répondre au moins partiellement aux
questions posées dans le titre.
Déjà par chaussures j'entends les sandales, les
chaussures fermées et les chaussures montantes ou bottes.
J'ai remarqué que l'usage des bottes est souvent
dédaigné en reconstitution alors j'en profite pour
apporter quelques sources sur le sujet.
Bottes
à tiges montantes trouvées sur le site d'Antinoé
-Egypte deuxième tiers du IIème siècle
après J.C. (Le
cuir et la Pelleterie à l'époque Romaine - Martine
Leguilloux)
Bottes - Citeaux 1109
Bottes dites de l'abbé Richard - 1225 - hauteur : 28 cm - Musée de Rouen
Les semelles cloutées
Exemple
d'implantations des clous dans des semelles de
chaussures de Valkenburg (Pays-bas)
Le Cuir et la
Pelleterie à l'époque Romaine - Martine Leguilloux
Ces trois formes de chaussures ont été utilisées
tant dans l'Antiquité qu'au Moyen-Age, le cuir n'étant
vraiment pas une matière première rare et le choix entre
ces trois équipements était donc dicté soit par
les coutumes ou modes locales, soit par les climats régionnaux
et saisonniers, soit par l'état des chemins et des routes.
Peut on savoir à quelles époques on a
utilisé des semelles cloutées et ces semelles
cloutées étaient elles réservées à
des usages (la chasse - l'armée) ?
Je n'ai pas encore trouvé de source montrant que dans
les époques Grecques on utilisa des chaussures à semelles
cloutées. Par contre dans la Rome Antique,
la semelle
cloutée est attestée notamment avec les Calligae, les
sandales des légionnaires romains au
moins dès
l'époque de la guerre des Gaules donc au moins moitié du Ier
siècle avant J.C.
Effectivement les théatres des guerres entre Celtes et Romains
on laissé des masses de clous aux archéologues,
comme à Alésia par exemple.
Alésia - (Ier siècle av. J.C. - IIème siècel ap. J.C.
Clous trouvés à Alésia
En Chaplix (Suisse) - 150-180 ap. J.C.
Des fouilles remarquables ont été effectuées
à Avenches en Suisse (canton de Vaud) dans la nécropole
d'En Chaplix
ou il a été trouvé notamment la sépulture
d'un
travailleur agricole (inhumé avec des outils de travail
métalliques) datée vers 150/180 après J.C.
Cet homme portait des chaussures cloutées dont on retrouvé uniquement les clous caractéristiques.
Exemple de port de chaussures à semelles cloutées sans lien avec un contexte militaire.
Nécropole d'En Chaplix à Avenches en Suisse (Canton de Vaud)
Chartres - IIème siècle
A Chartres, en Eure et Loire, les fouilles ont mis au jour
une semelle de chaussure d'enfant en cuir très bien conservée et
également cloutée. La datation est du IIème siècle après J.C.
Source : Carte Archéologique de la Gaule - Eure et Loire
Autun IIIème siècle
Autun
- semelle cloutée trouvée au fond d'un puits -
fouille du faubourg d'Arroux - IIIème siècle
Savasse - IV et Vème siècle
On trouve aussi des semelles cloutées au IVème et
Vème siècle après J.C. comme par exemple dans la
nécropole de Savasse dans la Drôme au nord de
Montélimar où des fouilles ont été
menées par l'INRAP en 2010 sur le site de Croze.
La population inhumée était composée essentiellement d'adultes et il s'agissait d'un
groupe rural à mettre en relation avec une villa et une aglomération voisine. Sur ce site nous sommes en présence de
paysans et d'artisansdont
un grand nombre a été inhumé avec des
chaussures dont seuls les clous de semelles ont été
retrouvés (photo ci-dessous les semelles cloutées
reposent sur le bassin et le fémur gauche). Preuve
qu'également à cette époque
les chaussures à semelles cloutées étaient portées hors contexte militaire.
Nécropole de Savasse (Drôme)
Monnet La Ville - VIème VIIème siècle
Plus tardivement, à Monnet La Ville au musée Champagnole,
vous pourrez voir ce qu'il reste d'une chaussure à semelle
cloutée découverte lors des fouilles de la
nécropole Burgonde Mérovingienne.
Musée de Champagnole
Mais après l'époque Mérovingienne et notamment durant tout le Moyen-Age, nous n'avons
plus aucune trace d'un moindre clou de semelle de chaussure malgré la
quantité de fouilles entreprises que ce soit dans des
nécropoles ou dans des châteaux.
Ce
qui semble bien dire que l'usage des chaussures à semelles
cloutées a disparu et était inconnu durant la longue
période du Moyen-Age ..
Je vous montre ici mes sandales cloutées dont je me sers avec
mon équipement de Légionnaire Romain de la
République et mon équipement de Hoplite Grec.
Mes chaussures d'homme d'armes du XIIème siècle sont des bottes sans clous.
Et ici les semmelles de mes Calcei après environ une quinzaine d'Ost en Marche (environ 280 km)
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La chaussée (bibliographie "Les Voies romaines" Raymond Chevallier éditions Picard).
1 - Les voies pré-romaines
L'existence des pistes ou voies pré-romaines est attestée par :
- les textes classiques (par exemple les commentaires de César sur la Guerre
des gaules avec des vitesses de déplacement qui supposent l'existence de
voies déjà utilisées par les autochtones pour
leurs propres besoins.
- les données archéologiques : voies jalonnées de
sites (oppida, sanctuaires, nécropoles, tumuli,
mégalithes), présence de mobiliers
(cachettes de fondeurs de l'âge du bronze, monnaies,
pièces de harnachement, roues de chars), vestiges de routes fondées sur pieux de bois .
La roue est connue en Mésopotamie dès - 3 000 et apparaît dans la vallée du danube vers - 2 000.
Les routes pré-romaines comportent des réseaux locaux et
secondaires qui deservent des habitats puis se rejoignent. On constate
que les pistes Celtiques sont volontiers sinueuses, encaissées
et étroites.
Il existe également des itinéraires "à grande
distance" pour le commerce de produits précieux sous un faible
volume, tels que silex ou ambre dès le paléolithique moyen
ou les minerais (routes du cuivre et de l'étain) ou le sel.
En Grande-Bretagne, a été repéré un chemin
néolithique consolidé par des claies de bois
datées de 4 000 ans avant J.C.
En gaule des voies protohistoriques ont été
repérées en Picardie, dans la vallée de la Loire,
dans le Morvan, en Vendée, en Limousin, en Basse-Auvergne, en
Languedoc, dans le Gard, dans les Alpes.
De même en espagne, en Italie ou sur le pourtour méditerranéen.
2 - Les voies Romaines
Via Domitia se dirigeant aux abords de l'oppidum d'Ensérune dans l'Hérault
- la hierarchie des voies
Selon le texte de Siculus Flaccus, arpenteur du 1er siècle après J.C. ; il y a trois types de voies :
- il y a les
voies publiques,
construites au frais de l'état, qui portent les noms de
ceux qui les ont tracées.
Ces routes sont sous la
surveillance des curateurs qui les font construire par des
entrepreneurs. Pour la construction de certaines
d'entre elles, on exige aussi une somme fixe de la part des
propriétaires de la région.
- il y a les
voies vicinales,
qui s'embranchent sur la grande route (la voie publique) et qui
conduisent à travers la campagne et souvent aboutissent elles
mêmes à d'autres voies publiques. Elles sont construites
et entretenues par les magistri des
pagi qui assignent à chaque propriétaire le soin
d'entretenir la portion de voie qui traverse son domaine.
L'accès à ces deux types de chemins est libre.
- il y a enfin des chemins traversant des domaines particuliers dont
l'accès est réservé à ceux qui en ont
besoin pour parvenir à leurs champs. Ces chemins partent des
voies vicinales ou s'embranchent sur des voies appartenant en commun a
deux propriétaires qui se sont entendus pour les entrenir
à frais communs.
De fait, les voies publiques, les chemins vicinaux et les chemins
privés constituent des limites de propriétés,
forment un cadastre avec parcellaire que nous pouvons souvent
reconnaitre encore aujourd'hui.
Il existait une "Police de la Route". Des unités militaires assurent la surveillance des trafics.
Des forces permanentes sont stationnées dans des postes ou tours
de guet aux carrefours, près des gués, des points d'eau.
On connait grand nombre de ces postes localisés par des inscriptions funéraires.
- la structure des voies
La largeur des voies varie avec leur hierarchie mais pas uniquement.
Les voies romaines sont volontiers rectilignes et ceci parfois sur des dizaines de kilomètres.
Le tracé d'une voie commence par le creusement d'un fossé
dont la profondeur varie en fonction du terrain car on cherche à
atteindre un sous-sol solide.
Extrait
de la revue "Connaître les Yvelines" éditée
par le conseil général - 2ème trimestre 1989
Ce relief négatif est compensé par une succession de
couches disposées généralement de la
manière suivante :
- La couche de base est un radier de grosses pierres posées
à plat dont la fonction est d'établir une assise solide
et d'assurer le drainage des eaux de ruissellement. Ce radier
est contenu par de grosses et longues pierres de marge, très
bien calées. Ces Umbones (pierres saillantes) en roche dure
peuvent être reliées par des traverses.
Ce sont probablement ces aménagements qui ont donnés l'image et le terme de
"chaussée".
- Au dessus du radier, une couche de terre servait à égaliser la surface.
- Pour finir, suivait un rudus de cailloux concassés sur place,
calibrés et damés ; puis sablés et
compactés.
L'entretien et la refection consistaient à recharger
régulièrement la voie ce qui a créé une
stratigraphie. Une voie découverte en 1839 à Paris,
à la hauteur de la rue des Mathurins comportait huit couches
superposées sur deux mètres de haut.
L'image de la voie dallée ne doit pas induire en erreur car le pavage n'est de rigueur qu'en ville.
En général ont se satisfait de réaliser une
surface régulière, compacte, homogène, solide et
fonctionnelle de pierraille damée présentant un bombement
central servant à l'évacuation des eaux de pluie et au
partage du trafic.
Un revêtement particulier peut être fait de rangs de
pierres disposées en oblique à 45 degrés par
rapport à l'axe de la route afin de mieux résister au
déchaussement.
Sauf dans les secteurs dalés, la voie romaine était
poussièreuse mais poreuse et ne retenait pas l'eau de pluie ce
qui la rendait en général ouverte à la circulation
en toute saison.
Portion de voie romaine rocheuse, aux abords de la Via Domitia près de Roquefort des Corbières
La largeur des voies varie avec leur classement et était
fixée par des règlements administratifs, mais dans les
faits variait dans le temps et l'espace le long d'un même
itinéraire.
Sont plus larges : les secteurs les plus fréquentés, les
tournants (pour faciliter les manoeuvres des chars en l'absence d'avant
train pivotant), les aires aménagées pour les croisements.
En bordure de voie, à côté de la bande de
roulement centrale, la voie peut être bordée de
trottoirs et de pistes sableuses réservées aux cavaliers
et aux troupeaux.
Voie romaine sur le site de Jouars-Ponchartrain Diodurum dans les Yvelines
Photographie Sylvie Rudrauf 2005
- les abords de la voie
Il a été démontré l'existence de plusieurs types de fossés.
- des fossés de drainage (largeur 1,10 à 1,70
mètres). La présende de tels fossés n'est pas
constante mais en rapport avec la nature du terrain
traversé.
- des fossés dits de limites, situés à une
vingtaine de mètres de part et d'autre. Peut être en
protection contre les embuscades ou bien pour matérialiser
l'emprise publique avec interdiction de cultiver, planter, bâtir
afin de limiter les risques
d'empiètement (tout comme à notre époque).
- le bornage des voies
Les voies étaient bordées par des bornes en pierres appelées bornes milliaires.
Leur nom vient de celui du mille qui sert à jallonner les voies
(soit mille pas romains ou 1 478,50 mètre. Le double pas
(passus) était en effet égal à 1,48 mètre
(soit 5 pieds ou 1/2 perche).
Ces bornes se présentent comme des colonnes cylindriques ou
ovalisées, parfois parallélépipédiques, de
calcaire, grès, granit ou basalte dont la base est cubique et en
saillie afin de permettre un enracinement plus solide et dont la
hauteur varie entre deux et quatre mètres. Le
diamètre varie de 0,5 à 0,8 mètre (les
diamètres les plus petits semblant les plus tardifs).
La lieue qui correspond à un mille et demi fut
officialisée sous Caracalla (188-217). Son emploi est conforme à la
mesure locale dans les pays "romanisés" comme le nord de la
Gaule et a survécu au Moyen-Age.
Chétien de Troyes (1135-1183) parle d'une "lieue Galesche" (Gallisca - Gauloise).
Le plus ancien milliaire connu date de 252 avant J.C.
Nombreux poteaux indicateurs étaient en bois et à
côté des bornes officielles il en existait des
privées.
Les mentions habituelles figurant sur les bornes milliaires sont :
- le nom du constructeur ou du restaurateur de la route (souvent un empereur ou un gouverneur de province).
- la distance entre le lieu ou la borne est implantée (lequel
n'est jamais mentioné) et le lieu de départ ou
d'arrivée de la voie (le centre ville, le forum ou
bien une porte).
Un certain nombre de milliaires sont parvenues jusqu'à notre
époque, certaines encore en lieu et place, d'autres
réutilisées ou déplacées.
Lors de la christianisation, ces bornages seront souvent remplacés par des croix, des oratoires ou des chapelles.
Bornes
milliaires utilisées comme pilliers d'appuis de charpentes
sur le site médiévale du vallon de la Clotte près
de Roquefort des Corbières
- les ouvrages d'art
Les ponts
Avant la construction des ponts, puis de façon concurrente ; on
a utilisé des bacs manoeuvrés à la rame ou
à la draille.
Les gués naturels se situent aux endroits de moindre profondeur,
avec accès par un plan incliné et passage en biais pour
lutter contre le courant.
La plupart des gués ont été aménagés
à l'aide de troncs d'arbres, de pierres puis à
l'époque romaine de dalles ou briques.
Les ponts doublent souvent les gués sans les remplacer.
C'est ainsi qu'à Limoges (Augustoritum, le gué
d'Auguste), un gué gaulois a été doublé
d'un gué romain à 700 mètres où l'on a
découvert (en 1964) des pieux reliés par des madriers
horizontaux. Ce second gué fut lui même relayé par
un pont ruiné en 1182 et reconstruit au 18ème
siècle.
Petit gué et pont attenant à Montchauvet dans les Yvelines
Photographie Sylvie Rudrauf 2003
Les ponts comptent parmi les monuments romains les plus célèbres.
460 ponts sont conservés ou attestés en Italie, 72 en Gaule, 142 en Espagne et 29 en Grande-Bretagne.
Il apparait que les méthodes de construction ont
été très différentes dans le temps et dans
l'espace.
En pays méditerranéen, l'été, dans le lit
à sec on pouvait édifier les piles directement sur le
fond.
Dans le cas de cours d'eau pérennes, les piles étaient
montées sur pilotis et poutrages et nous connaissons l'existence
d'ouvriers plongeurs (Vitruve 1er siècle avant J.C.).
Dans ce domaine comme dans d'autres, Rome s'est inspirée des connaissances antérieures (Etrusques et Grecques).
Les ponts ont un rôle fonctionnel évident mais
permettaient également d'exalter la puissance de Rome et la
gloire des empereurs (sculptures, colonnes, arcs, inscriptions).
Généralement construits avec un soin extrème,
entretenus et fortifiés parce qu'ils permettaient de lever des
péages en des points de passage obligés ; les ponts
romains ont longtemps survécu, au moins jusqu'au Moyen-Age et on
retrouve leurs traces dans les textes.
Beaucoup de ponts antiques n'ont été
remplacés qu'au 18ème siècle à la suite des
modifications imposées au régime fluvial par les grands
travaux.
Bien que sur des itinéraires antiques, de nombreux ponts dits "romains" sont médiévaux.
Au Moyen-Age l'architecture des voutes et les systèmes d'attelage connaitrons des progrès.
On reconnaitra donc les ponts médiévaux par leur
technique de construction : ils sont surhaussés sur des arches
en plein-cintre ou en arc brisé, la chaussée et
étroite, le passage parfois gardé par des tours donnant
lieu au prélèvement d'un péage.
Les tunnels
Les tunnels routiers antiques sont impréssionants et la encore
les romains ont perfectionné des techniques Etrusques et
Grecques permettant à deux équipes travaillant à
partir des extrémités d'une galerie de se rejoindre avec
précision.
Certains tunnels atteignent plus de 700 mètres de long, sont munis de puits de lumière et d'aérations.
- les stations relais
Aux abords des voies et judicieusement réparties, existaient des
stations relais comme les mansiones qui étaient des
établissements permanents destinés a herberger les
voyageurs ou bien les mutationes, relais destinés au changement
d'équipage des chariots et cavaliers.
Les mutationes étaient en moyenne répartis tous les neuf
milles (13 kilomètres) et les mansiones tous les vingt milles
(soit 30 kilomètres).
La structure d'une mansio comporte en principe plusieurs secteurs de fonctions différentes souvent dans un enclos :
- une grande cour à portiques et large entrée pour les véhicules et avec un abreuvoir.
- des écuries et étables (40 chevaux sont cités dans les textes).
- des alignements de chambrettes pour les voyageurs.
- une taverne.
- des thermes munis d'un bon système hydraulique.
- un habitat voisin pour les services (atelier de forge, boutiques, entrepôts).
- éventuellement d'un édifice administratif (douane),
d'un établissement médical, d'un sanctuaire, d'une
nécropole.
De nombreuses stations ont été identifiées
notamment à Jublains, à Thésée ou à
Ambrussum sur la Via Domitia.
3 - Les voies post-Romaines
Nombre de voies , qu'elles soient publiques,
viccinales ou privées ; ont continué à servir aux
déplacements humains durant les siècles suivant la
disparition de l'empire romain.
Elles ont subsisté pour satisfaire les besoins de commerce, le
déplacement des armées ou des besoins nouveaux tels que
les pélerinages.
Leur subsistance dépendait bien sûr de la capacité à les entretenir.
On sait que des voies antiques étaient toujours
fréquentées au Moyen-Age car jalonnées par des
églises, des châteaux, des sanctuaires, ou des tours
édifiées dans le but de prélever des péages.
Le contexte féodal avec l'émiettement de
l'autorité administrative n'a pas été favorable
à la création de nouvelles voies et le plus souvent, le
réseau mediéval sera la réadaptation de
tronçons anciens.
Les itinéraires reconnus comme médiévaux ne sont pas rectilignes, sont encaissés et étroits.
Aujourd'hui, de nombreux tronçons ont été repris
par nos routes nationales ou autoroutes. Certaines voies servent encore
en milieu rural pour joindre les champs, d'autres sont cachées
sous la végétation ou en forêts, d'autres
encore sont sous les champs cultivés et apparaissent à
l'aide de la photographie aérienne.
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L'édit de Dioclétien (245-313) nous renseigne sur les charges utiles portées :
- un chameau porte 200 kg.
- un mulet porte de 120 à 150 kg.
- un âne porte 80 à 100 kg.
- un porteur 40 kg.
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Le convoi
Le sujet de l'alimentation des membres d'un convoi (hommes et surtout animaux) est, vous allez le constater, fondamental.
Si il existe un risque de ne pouvoir se ravitailler aux étapes
du parcours , il sera
nécessaire d'emporter dans le convoi, les quantités d'eau
et de nourriture suffisantes à l'autonomie.
Le fait d'être en mouvement va imposer un choix de consommables
simples à conditionner, transporter et conserver tels que
céréales, légumes secs, fruits et plus rarement
fromages et viandes.
Vespasien marchant contre les juifs - Flavius Joseph - Bruges 15ème siècle - propriété de la BNF
Prenons pour exemple une armée de 4 500 hommes composée
de 2 000 fantassins lourds, 2 000 fantassins légérs et
500 cavaliers.
Les cavaliers possèdent chacun deux montures et les fantassins lourds ont un équipement de 35 kilogrammes.
Le commandement de ce convoi doit impérativement savoir répondre aux questions suivantes :
- Combien de temps faudra t'il pour mettre en mouvement ce convoi ?
- Quelle sera la longueur du convoi ?
- Quelle devrait être la vitesse de progression ?
Pour procéder à ces calculs, nous ne prendrons en compte
que le transport du matériel collectif minimum, de l'eau et
de la nourriture.
Le matériel est composé des tentes pour bivouacer (tentes
de dix pour les fantassins, de cinq pour les cavaliers, en cuir ou en
lin d'un poids 50 kilogrammes avec les pieux).
La nourriture pour les hommes s'élève à 1
kilogrammes/jour et celle des chevaux à 30 kilogrammes de
fourrage/jour pour les chevaux de trait et 10 kilogrammes/jour pour les
chevaux de selle.
L'eau pour les hommes (2 litres/homme/jour) et l'eau pour les chevaux
(30 litres/cheval de trait/jour et 10 litres/ cheval de selle/jour).
Ces produits sont transportés au moyen de chariots de type
tombereau, chargés avec 500 kilogrammes et tirés par un
cheval.
Iconographie issue du manuscrit The Hague Normandie 1180 - propriété "Koninklijke Bibliotheek" Pays-Bas
Ceci donne :
Tentes
400 tentes de fantassins et 100 tentes de cavaliers = 25 tonnes.
Eau (autonomie de trois jours)
- Hommes = 27 tonnes
- Chevaux = 105 tonnes
Nourriture (autonomie de trois jours)
- Hommes = 13,5 tonnes
- Chevaux = 105 tonnes
Ce qui fait en nombre de chariots
- Tentes = 50
- Eau hommes = 54
- Eau chevaux = 210
- Nourriture hommes = 27
- Nourriture chevaux = 210
TOTAL = 551 chariots (dont les 3/4 uniquement pour l'alimentation des chevaux).
En terme de longueur de convoi (cinq mètres pour les chariots,
trois mètres pour les chevaux de selle à deux de front et
1,5 mètre pour les fantassins à trois de front.
Le convoi s'étire sur 6 255 mètres.
Si les fantassins lourds se
déchargeaient ne serait ce que de 20 des 35 kilogrammes de leur
équipement, il faudrait rajouter 80 chariots au convoi et
rallonger la colonne de 400 mètres. Il faudrait de plus emporter
l'eau et la nourriture nécessaire à ces 80 chevaux de trait supplémentaires !
Mise en mouvement du convoi :
Si l'on compte 4 secondes entre le moment ou un chariot commence
à bouger et le moment ou le suivant se meut également, si
l'on considère 2 secondes entre le moment ou un rang de
fantassins part et le moment ou le suivant se met en mouvement et si
l'on considère 2 secondes entre le moment ou un rang de
cavaliers commence à partir et le moment ou le rang suivant
démarre ;
il s'écoule 1
heure 40 minutes entre le moment ou la tête du convoi part et le
moment ou la queue de ce même convoi pourra a son tour partir !
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L'expédition militaire d'octobre 1407 dirigée par
Antoine duc de Brabant contre Renaud IV duc de Gueldre - Serge BOFFA
"L'armée constituée par Antoine de Brabant va quitter
Bruxelles pour gagner la Meuse, distante d'environ 125 kilomètres ; ceci en en cinq jours. L'armée franchira
la Meuse après avoir traversé la ville de Maastricht
passage obligé du fait de son unique pont".
Antoine de Brabant et la requête qu'il adresse aux états de Brabant
En juin 1404, Antoine de Bourgogne devient, au nom de sa mère Margueritte de Male, gouverneur du duché de Brabant.
A la mort de la duchesse Jeanne, en décembre 1406, il est choisi par les Etats de Brabant comme nouveau duc.
Moins d'un an plus tard, le 25 août 1407, Antoine rassemble les
trois Etats de Brabant à Bruxelles et leur demande de le servir
avec une grande compagnie d'hommes d'armes et de le suivre pour une
destination qu'il désire encore garder secrête.
Les députés des bonnes villes de Brabant refusent de le
servir (la raison pourrait en être le manque d'information sur le
but de l'expédition ou l'attitude autoritaire que semble avoir
adopté le nouveau prince, ce qui aurait pu toucher la
susceptibilité des Etats de Brabant.
Par contre la noblesse accepte de suivre Antoine dans son entreprise.
Donc en octobre 1407, Antoine réunit une puissante armée
et s'en va combattre (on le saura par le suite) l'ennemi
éternel, le duc de Gueldre. Ce dernier n'ayant toujours pas
désiré reconnaître Antoine comme suzerain en lui
prêtant les hommages de coutume.
En moins d'un mois, Antoine constitue une armée
hétéroclite mais puissante, composée de
brabançons, d'hommes d'armes français et de milices
d'Anvers et de Bois-le-Duc.
On peut penser, ce que l'absence de documents confirme, qu'aucun
impôt de guerre ne fut levé à cette occasion.
La marche vers la Meuse
Le 3 octobre au matin, l'armée quitte Bruxelles et arrive le
soir à Louvain distante d'environ 35 kilomètres.
Le 4 octobre, l'armée rejoint Louvain à Diest, soit un parcours d'environ 30 kilomètres.
Le lendemain l5 octobre ; l'armée parcours à nouveau
environ trente kilomètres pour arriver à Diepenbeck.
Le 6 octobre, l'armée s'arrête à Vlijtingen, soit 19 kilomètres.
L'armée arrive le lendemain devant Maastricht distante de 10 kilomètres.
Les prépartifs dans Maastricht en prévision de sa traversée par l'armée
Les troupes brabançonnes recoivent l'autorisation de passer par
Maastricht afin d'y franchir l'un des rares ponts qui enjambent la
Meuse.
Maastricht est restée neutre vis à vis des querelles et
conflits qui animent la région (notamment celui existant entre
Jean de Bavière et la ville de Liège), mais le magistrat
de Maastricht tout en affirmant la neutralité de la cité
nomme quatre capitaines : Godonoel d'Elderen, Thierry seigneur de
Noberlingen, Jean de Ciney seigneur de Guitrode et Henti Bovier
lesquels avec l'aide de deux bourgmestres Antoine Yserman et Ernoul de
Here sont chargés d'organiser la défense de la ville.
Les bourgeois sont armés et des rondes de surveillance sont instaurées.
Pour éviter tout désordre et pillage lors du
défilé des soldats, on remet en vigueur une ordonnance
rendue en 1397 à l'occasion du passage des troupes de la
duchesse de Brabant lors de la seconde guerre de Gueldre.
D'après cette ordonnance, les portes et les tours de l'enceinte
sont garnies d'archers et d'artilleries, les compagnies communales se
tiennent sur les remparts aux postes qui leur sont assignés par
les capitaines chargés de la défense ; et les
métiers en armes sont placés dans les rues et sur les
places publiques que doivent traverser les troupes.
Dans toutes les autres rues, des chaines sont tendues afin d'en interdire l'accès.
Et, pour plus de sécurité, on ne laisse entrer dans la ville qu'un seul détachement à la fois.
Il doit d'abord être sorti par la porte de Wyck avant qu'on ouvre
à nouveau la porte de Tweebergen pour en recevoir un autre.
Il ne faut pas laisser entrer plus d'hommes de guerre que les forces de
la ville ne sauraient en maitriser. Ces détachements sont
encadrées à l'avant et à l'arrière par un
des quatre capitaines maastrichtois.
La tarversée de Maastricht
Le samedi 8 octobre, les premiers hommes d'armes entrent dans Maastricht.
Selon les chroniqueurs, le premier jour de cette longue parade, plus de
trois cents voitures chargées de vivres et de matériel de
guerre entrent dans la ville et elles sont suivies par deux
détachements d'environ milles hommes chacun.
Le lendemain, du matin jusqu'en début d'après-midi, les
hommes d'armes du duc défilent sans discontinuité et
empêchent le bon déroulement de toute autre
activité.
Le troisième et dernier jour, le défilé reprends
et c'est encore du matin jusqu'au soir que les troupes d'Antoine
traversent la ville.
Convoi en ville - 16ème siècle - propriété de la B.M. de Lyon
Nous ne connaissons pas l'importance exacte de l'armée qui
accompagne Antoine de Brabant. Les comptes nous apprennent que
l'escorte d'Antoine comptait 2 900 chevaux. Ce chiffre est
élevé et fort probablement, tous ces chevaux
n'étaient pas montés.
Si l'on tentait une extrapolation
(peut être discutable) basée sur le fait que le convoi est
réparti de manière uniforme entre les chariots et les
hommes et en calculant sur les bases des données du 8 octobre ;
celà conduirait à compter un effectif total de 750
chariots et 5 000 hommes. De même si l'on estimait un seul cheval
monté sur quatre, cela nous amènerait à environ
700 cavaliers (P. Rudrauf).
Est-ce l'importance de l'armée Brabançonne qui rend la
traversée de Maastricht si longue, les mesures draconiennes
prises par le magistrat de la ville pour éviter tout
débordement de la part des hommes, ou l'obligation de passer sur
un seul et unique pont ?
Quelle que soit la raison, cette manifestation a dû fortement
impressionner les habitants de la ville ainsi que les seigneurs des
régions avoisinantes.
L'issue de l'expédition
Renaud IV, duc de Gueldre fini par comprendre qu'il est la cible
du duc de Brabant et craint tant pour sa sécurité que
pour celles de ses terres, car la soudaineté de l'attaque et
l'importance de l'armée qui s'apprête à envahir son
duché l'empêche d'organiser sa défense.
Il envoie des ambassadeurs chargés des pleins pouvoirs pour négocier une paix à n'importe quel prix.
Le prix sera notamment de rendre les hommages à Antoine de
Bourgogne et également de lui payer une somme de plusieurs
milliers de couronnes en or frappées par le roi de France ou en
autre monnaie d'or.
On peut penser qu'une partie de ce montant servira à payer les
nombreux hommes de guerre qui l'ont accompagné ainsi que les
nombreux moyens matériels et logistiques mis en oeuvre.
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Le réseau routier antique en forêt de Rambouillet - Gilles Becq
Il a été souvent reproché aux archéologues
de s'être peu intéressés aux ouvrages routiers
postérieurs à l'empire romain ; mais c'est surtout dans
un environnement bien spécifique qu'ils ont
négligé la recherche des routes : le milieu forestier,
où les techniques modernes ne sont pas d'un grand secours (la
photographie aérienne est inopérante) et où les
repères habituels sont rares, voire inexistants (bornes
milliaires, calvaires, chapelles, maladreries et surtout toponymes,
chaussée, "perré", "chemin ferré", que l'on trouve
en plaine.
Pourtant, depuis une vingtaine d'années, des recherches
ponctuelles ou systématiques ont permis de localiser un grand
nombre de vestiges d'occupation en forêt à toutes les
époques. Il est raisonnable de penser que le réseau de
communications, routes ou simples chemins, a suivi l'évolution
du peuplement de la forêt et a répondu à ses
besoins durant près de vingt siècles.
La forêt de Rambouillet reste cependant encore floue sur la carte
routière régionale, au point que sa traversée par
des routes dont l'antiquité est établie , demeure
incertaine : en particulier le chemin de Blois, route de la
vallée de la Loire à la vallée de la Seine, que
l'on perd près de Rambouillet, et la route de Paris à
Dreux, qui, passé Jouars, offre plusieurs trajets possibles en
direction de Dreux (la distance indiquée par l'itinéraire
d'Antonin est de 22 lieues gauloises, soit environ 49
kilomètres).
Des prospections ayant pour but de rechercher et préciser le
réseau routier dans la forêt de Rambouillet, et de mieux
le situer dans ce contexte, ont été menées depuis
quelques années, avec en outre le souci d'établir si
possible des critères chronologiques et
hiérarchiques pour les structures relevées.
Il est rare en effet de trouver un objet pouvant fournir une date de
construction en effectuant une coupe dans le corps de la
chaussée, et pour ce qui est de la catégorie (on dit
aujourd'hui vicinale, départementale ou nationale), la largeur
et la présence ou non d'empierrement ne sont pas
déterminantes.
Afin de limiter les surfaces (considérables) à
prospecter, des points de passage délicats ont été
explorés en priorité : gués, fonds humides, fortes
pentes, crêtes, qui ont fait l'objet, en général,
d'aménagements particulièrement soignés :
déblais ou remblais, empierrement, agglomérats formant
ballast.
Plusieurs modes de construction ont été mis en
évidence, dont l'un paraît représenter
l'archétype gallo-romain régional (mais également
connu un peu partout sur le territoire de la Gaule : c'est un
empierrement dont la surface de roulement bombée est
constitué d'un hérisson de pierres plates posées
de chant, maintenu par deux bordures latérales de pierres plus
volumineuses placées longitudinalement.
Ce procédé est généralement attribué
aux ingénieurs romains, quoiqu'il n'existe pas de preuve qu'il
n'ait été copié ultérieurement ; les XVIe,
XVIIe, XVIIIe siècles en ont fait usage, avec des adaptations
plus ou moins heureuses : le hérisson était
disposé longitudinalement et présentait de ce fait une
tendance à l'écrasement due à l'effort
exercé par les roues de chariots, au contraire du
hérisson transversal qui répartit mieux les charges.
Les routes possédant hérisson recensées
jusqu'à présent dans le sud des Yvelines sont au nombre
de quatre.
1) la plus impressionante est la route de Jouars à
Chartres, déjà mentionnée ou décrite
plusieurs fois ; elle présente une remarquable unité de
construction depuis le poteau de Montavale, actuel carrefour du comte
de Toulouse, jusqu'à proximité de Guiperreux, où
elle franchit la Guesle en direction de l'éperon barré
d'Epernon. Sa largeur entre les bordures relevée dans la coupe
30, VIIe série, est de 6,20 m ainsi que dans les coupes 6-7 de
la XIIe série ; ces deux points respectivement situés
à Saint-Léger et à Guiperreux sont distants de 8
km.
Coupe au poteau de Montavale, première bordure et bordure de l'élargissement (photo G. Becq)
L'élargissement à 7,10 m constaté dans la coupe au
poteau de Montavale est dû soit à l'approche d'un secteur
difficile (la descente vers les Mesnuls), soit à la
proximité de l'agglomération de Jouars, occasionnant un trafic plus important.
La descente elle même offre un aspect fréquent des vieux
chemins, la division en "patte d'oie" (ou "écheveau")
consécutive au ravinement par les eaux. Le choix des
matériaux, et c'est encore une constante régionale, est
purement local ; sables argileux, mêlés de sable de
Lozère, et meulières ont été probablement
tirés des petites carrières que l'on peut voir au bord du
plateau.
Dans la base de meulières qui forme le soubassement de la
chaussée subsistent des vides ou l'eau parvient à
circuler, ce qui ne semble pas compromettre la solidité de
l'ensemble et explique peut-être l'absence de fossés
latéraux, rendus inutiles.
Cette route reliait Chartres, capitale des carnutes à la pointe
nord-est de leur territoire, dont le centre était Poissy.
2) Un tronçon
de route identique a été retrouvé en 1976,
grâce à la sécheresse, dans l'étang du
Gruyer au nord de Rambouillet.
Sa largeur entre bordures n'est que de 3,30 m en moyenne. La date en
est assurée : il dessert un établissement gallo-romain,
également noyé dans l'étang, datable du IIe
siècle d'après le mobilier recueilli. Il peut être
classé comme diverticule, c'est à dire chemin
d'accès privé, car il ne lui a pas été
trouvé de prolongement vers le sud.
3) Sur la commune de
Clairefontaine (bois domanial, XXIIe série, coupe 15), un chemin
en tous points identique au précédent et sensiblement de
la même largeur, 3,40 m (la coupe donne environ 4 m, mais elle
est relevée dans un fossé existant qui traverse la
chaussée en biais) contourne la vallée du parc en bordure
du plateau.
Il est rechargé par endroits de scories de fer et de fragments
de tuiles à rebords ; on notera qu'aucun ferrier n'a
été retrouvé dans les environs immédiats ;
ils ont pu être récupérés
intégralement pour garnir la route.
4) Au cours d'un
passage en avion au dessus de Rambouillet, une longue trace
jaune-orangée était visible au milieu des maïs en
lisière de la forêt verte. Cette trace correspond à
un chemin disparu, constitué de meulières et de scories
dont l'oxyde de fer lui donne sa couleur.
Ce chemin à peu près d'orientation est-ouest,
pénètre dans la coupe 3 (XVIIe série), traverse la
coupe 4 (où la piste cyclable l'a partiellement détruit)
et la coupe 1, puis on le perd après la voie de chemin de fer.
L'assèchement pour travaux de l'étang de la
Grenouillière, en 1987, en a livré un court
tronçon, doté d'un hérisson et de bordures
latérales d'une largeur de 3,30 m à 3,40 m.
Il parait difficile de contester le caractère antique des
empierrements qui viennent d'être décrits. En revanche la
présence du hérisson transversal seul ne suffit pas
à dater une route : la route Goron possède un
hérisson semblable et son tracé a été
redressé au XVIIIe siècle.
Quelle peut être, par ailleurs, la valeur chronologique de
l'emploi de scories de fer ? Sans doute très relative, mais
comme on ne connait pas de textes médiévaux signalant
l'exploitation de fer en Yvelines, on peut attribuer l'usage des
scories en guise de recharge ou de remblai à la fin de l'empire
romain ou au tout début du Moyen-Age.
La forêt de Rambouillet renferme bien d'autres vestiges de
routes, qu'il serait trop long d'énumérer ici, d'aspect
et d'importance variés, allant jusqu'au simple chemin de terre
battue.
Seule une prospection systématique et un relevé
méthodique de toutes ces traces d'activité humaine
pourront inscrire de façon précise chaque petit bout de
chemin dans un contexte historique.
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L'équipement du légionnaire romain dans l'armée romaine en marche P. Rudrauf
Les textes nous ont laissé beaucoup d'informations sur la tenue
et la charge des légionnaires en marche, et les
représentations nous les confirment.
Cependant je voudrais insister sur le fait qu'il faut se garder de
considérer rigidement les faits du passé et il faut
admettre que même si des usages sont attestés, les
pratiques étaient étroitement soumises aux conditions de
l'environnement. Surtout dans les questions du domaine militaire,
domaine dans lequel les commandements ont a composer intelligement (et
avec expérience) avec les conditions extérieures et l'environnement
(qualité et nature des voies à disposition,
météorologie, reliefs des parcours, urgence du
déplacement, importance du convoi, distance à parcourir, budget ou moyens
matériels à disposition).
Ceci dit, il faut savoir que (selon Frontin - 1er siècle
après J.C.), c'est sous l'empereur Marius ( 156 avant J.C.
- 86 avant J.C.), et afin de parer aux inconvénients
de l'immense convoi de
bagages qui accompagne une armée en marche, qu'il a
été décidé de faire porter à chaque
soldat les vivres pour quinze jours (soit environ quinze kilogrammes),
plus les ustensiles nécessaires pour préparer et
consommer ces aliments (gammelles, bol, sel, nécessaire à
feu), l'eau et le bagage personnel (affaires de toilettes,
manteau).
Le tout était porté au bout d'une perche en bois portée sur l'épaule (fourca).
Ce matériel s'ajoutant à l'équipement militaire
du légionnaire, déjà conséquent,
composé de l'armure (de mailles puis ségmentée),
du casque accroché sur la poitrine, du glaive au baudrier, du
pilum à la main droite et du grand bouclier à la main
gauche.
Impediti représenté sur la colonne Trajane érigée en 113 après J.C.
Quand cet usage fut introduit, la nouveauté porta à
plaisanterie et de là naquit le sobriquet donné aux
soldats de Marius ; les
muli Mariani (mules de Marius) qui comme les bêtes de travail portaient leur charge sur le dos.
En langage militaire, les soldats qui marchaient avec une charge
pesante d'armes, de bagage personnel et de provisions
étaient nommé les
Impediti.
Expeditus tel
que représenté sur la colonne Auréliene
érigée entre 176 et 193 après J.C.
Les
expeditus (libre et sans
rien qui gène) etaient quant à eux
déchargés des provisions et du
bagage personnel ceci dans le but de pouvoir adopter le pas de marche
accéléré (environ 7 km/h).
En fait le légionnaire romain tel qu'il est
représenté en mission militaire vit pour ainsi dire
toujours avec une partie de son équipement sur lui. Ainsi on le
voit faucher les blés, abattre des arbres ou creuser des
fossés pour le campement toujours équipé de son
armure mais en ayant troqué le glaive et le bouclier contre la
hache et la pelle.
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Avant et pendant la marche, les apports des missions de "renseignements" et des missions "d'éclaireurs" (P. Rudrauf)
Le renseignement
Rassembler les hommes pour former une armée est une chose.
Mettre cette armée en mouvement en est une autre, plutôt compliquée nous l'avons vu plus haut (Le Convoi).
Mais pour assurer une progression à cette armée, aussi
sûre et durable que possible ; il est nécessaire
d'anticiper sur les évènements afin de limiter les
surprises lesquelles peuvent être souvent
désagréables mais aussi parfois catastrophiques.
Il est indispensable de se documenter solidement et au préalable
sur l'environnement matériel et géographique des lieux
à traverser et d'être tenu informé de la situation
géopolitique de la région.
Si la région est calme et sous contrôle alors les choses
sont assez simples a gérer, mais en cas de doute il faut avoir réponse
à nombreuses questions :
Les territoires que l'on projette de parcourir sont ils peuplés
par des amis, des alliés, des peuples neutres ou hostiles
à notre présence. Ce qui sous entend d'avoir une
excellente connaissance des peuples en question comme de savoir quels
en sont les rois, seigneurs ou chefs ? Quelles en sont leurs cultures et
coutumes. Quels sont leur modèles hierarchiques. Avec qui ces peuples
sont ils en alliances ou en conflits. Quels sont leurs potentiels
militaires et leurs caractéristiques (nombre d'hommes,
répartition entre cavalerie, chars et fantassins).
Où sont localisées ses forces. Où sont situées les
frontières entre ces peuples ou ces autorités.
Autres questions :
Quelles vont être les conditions de progression de notre armée.
Quels sont les types de chaussée à parcourir (principales
ou secondaires). Quels sont leurs états (entretenues ou
délabrées, propre au roulement des chariots ou non). Ces
voies restent elles pratiquables par temps de pluie. Quels en sont les
environnements naturels (marécageux, sous couvert forestier,
à découvert). Ya t'il des obstacles naturels à
franchir comme des cours d'eau et sont ils franchissables par
gué ou par pont. Doit on gravir des collines ou montagnes et
quels en sont les passages (vallées, cols).
Ou encore :
Comment ravitailler les hommes et les bêtes.
Pour satisfaire les besoins des hommes et ceux nettement plus important des
bêtes (voir plus haut Le Convoi) en nourriture, eau et fourrage ;
peut on mettre à contribution les peuples autochtones (par tribu
ou impot de guerre ou bien par paiement des denrées). Peut on
prévoir des lieux de stockage, des dépots
régulièrement échelonnés le long du
parcours.
L'ensemble des données est mis "à plat" sur une carte.
Ces données, ces renseignements sont obtenus par des
personnes particulièrement sûres et
expérimentées.
En faisant la synthèse des informations avec celles recueillies
par d'autres biais (voyageurs, commerçants, autochtones) il
devient possible d'apréhender au mieux le contexte dans lequel
l'armée va devoir évoluer.
Les éclaireurs
Quand l'armée est sur la route et notamment en territoires
incertains, il est utile de la doter "d'antennes", de moyens
d'inspections des alentours et notamment de voir vers l'avant, sur le
tracé qu'il est prévu de faire suivre au convoi.
Ceci permet de localiser d'éventuels mouvements ou concentrations de troupes et d'en informer le corps d'armée.
Ceci permet de localiser les lieux propres aux ravitaillements du convoi et à ses bivouacs.
Ces missions importantes sont confiées à un corps de
cavalerie dont les qualités sont de pouvoir se mouvoir
rapidement et discrètement (de nuit si nécessaire).
Ce corps d'éclaireurs doit veiller "coûte que coûte" à conserver une
possibilité de retour, de lien avec le corps d'armée
quelque soient les évènements même violents.
A quelles distances du corps d'armée s'éloignaient et
opéraient ces éclaireurs et quels étaient leurs
effectifs ?
Pour l'Antiquité, Polybe (historien et militaire Grec
210/202 avant J.C. - 126 avant J.C.) donne des informations quand il
relate un épisode de l'expédition d'Hannibal ;
l'arrivée de l'armée aux abords du Rhône.
Polybe - livre troisième - chapitre VIII
Hannibal se préparait à
faire passer à son armée les détroits des monts
Pyrénées, où il craignait fort que les Gaulois ne
l'arrêtassent, lorsque les Romains apprirent, par les
ambassadeurs envoyés à Carthage, ce qui s'y était
dit et résolu, et qu'Hannibal avait passé l'Ebre avec son
armée.
Aussitôt on prit la résolution d'envoyer en
Espagne une armée sous le commandement de Publius Cornelius et
une autre en Afrique, sous la conduite de Tiberius Sempronius.
Remarque :
Si Rome est parvenue à obtenir des informations précises
de ce qui se préparait à Carthage,c'est grâce
à des informateurs dans la place.
.
.. Hannibal après avoir
obtenu des gaulois, en partie par argent en partie par force, tout ce
qu'il voulait, arriva au Rhône avec son armée, ayant
à sa droite la mer de Sardaigne.
Sur la nouvelle que les ennemis
étaient arrivés, Publius, soit que la
célébrité de cette marche lui parût
incroyable, soit qu'il voulût s'instruire exactement de la
vérité de la chose, envoya à la découverte
trois cents cavaliers des plus braves, et y joignit, pour les guider et
soutenir, les Gaulois qui servaient pour lors à la solde des
Marseillais.
Remarques :
A nouveau, des informations sont parvenues à Publius le
renseignant sur la position de l'armée d'Hannibal et sur son
arrivée au bord du Rhône.
Publius envoie en avant de son armée 300 cavaliers guidés
par des Gaulois connaissant bien la région et les routes.
Le chiffre de 300 cavaliers est important et ne correspond pas vraiment
à ce que l'on imaginerait pour un groupe désirant rester
discret.
Peut-être Publius pensait il assurer la sécurité de
ce groupe au travers de son effectif dans des territoires
incertains ou propres aux embuscades.
Le matin sur le bruit que la flotte
des Romains était arrivée à l'embouchure du
Rhône, Hannibal détacha 500 chevaux Numides pour
reconnaître où étaient les ennemis, combien ils
étaient, et ce qu'ils faisaient.
Remarques :
Hannibal se sert lui aussi de ses informateurs, lesquels l'entretiennent du débarquement romain.
Lui aussi envoie, vers l'arrière cette fois, un groupe de
cavaliers chargé de repérer la position et et juger des
forces ennemies.
Le groupe envoyé est encore plus important que celui
"lancé" par Publius puisqu'il est formé de 500 cavaliers.
..
. Sur ces entrefaites arrivent les
Numides qui avaient été envoyés à la
découverte. La plupart avaient été tués, le
reste mis en fuite. A peine sortis du camp, ils étaient
tombés dans la marche des coureurs Romains, envoyés aussi
par Publius pour reconnaître les ennemis, et ces deux corps
s'étaient battus avec tant d'opiniatreté qu'il
périt d'une part environ cent quarante chevaux tant Romains que
Gaulois, et de l'autre plus de deux cents Numides. Après ce
combat les Romains en les poursuivant approchèrent des
retranchements des Carthaginois, examinèrent tout de leurs
propres yeux et coururent aussitôt pour informer le consul
(Publius) de l'arrivée des ennemis.
Publius, sans perdre de temps, mis
tout le bagage sur les vaisseaux et fit marcher le long du fleuve toute
son armée dans le dessein d'attaquer les Carthaginois.
Le lendemain à la pointe du
jour, Hannibal posta toute sa cavalerie du côté de la mer
comme en réserve, et donna l'ordre à l'infanterie de se
mettre en marche.
... trois jours après le décampement des Carthaginois, le
consul Romain arriva à l'endroit où les ennemis avaient
traversé le fleuve.
Remarque :
Ce texte nous fait comprendre que les éclaireurs ou "coureurs"
lancés par Publius s'étaient éloignés du
corps d'armée d'une distance équivalente à trois
jours de marche que l'on peut estimer à environ 80
kilomètres.
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Double victoire à Azincourt ou
la performance de l'armée Anglaise dans sa marche de seize
jours jusqu'à la bataille (P. Rudrauf)
Tout le monde en France connait Azincourt comme le lieu de la
défaite cinglante infligée par les Anglais aux
armées du roi de France.
Le 25 octobre 1415, conduite par Henry V et ses vassaux ;
l'armée Anglaise écrase une armée
Française pourtant supérieure en nombre. Cet
exploit militaire est à lui seul remarquable mais il
l'est beaucoup plus quand on réalise que cette armée
victorieuse à Azincourt avait dans les jambes 430
kilométres de marche continue depuis son départ, 16 jours
plus tôt, de Harfleur.
Après seize jours de marche, parcourant 27
kilomètres quotidiennement en moyenne, dans des conditions
météorologiques difficiles (pluie), harcelée
régulièrement par des corps armés Français,
et effectuant encore une étape de 32 kilomètres la veille
de la bataille ; c'est pourtant cette armée qui décimera la fine
fleur de la chevalerie Française.
Le parcours de l'armée Anglaise
Henry V avait comme objectif de remonter directement et au plus
court, en longeant la côte ; de Harfleur (qu'il venait de prendre
après un siège pénible) à la ville de
Calais distante d'environ 270 km ceci en utilisant les ponts qui
permettent de traverser la Somme.
D'après les différentes chroniques, on estime à 9
000 hommes l'effectif de l'armée au départ de Harfleur le
8 octobre 1415.
A raison d'une trentaine de kilomètres par jour, Calais serait atteinte en
huit à dix jours. Et c'est effectivement avec huit à dix
jours de réserve en nourriture que l'armée se met en marche.
La marche ne se déroulera pas comme prévu.
Tout d'abord dès les premiers jours et durant toute
l'expédition, les Français vont harceler la colonne en
marche.
Ensuite les ponts sur la Somme seront trouvés
détruits par des Français décidés à
en découdre. Dans ces conditions il sera jugé
préférable de ne pas s'exposer par une tentative de
passage au gué de Blanchetacque. Ce qui conduira le convoi
Anglais à longer loin la Somme
jusqu'à ce qu'un gué favorable soit
trouvé.
La nourriture emportée va manquer, il va falloir en chercher sur la route ...
La pluie et le froid vont s'en s'en prendre aux hommes et aux bêtes
qui devront progresser sur un sol lourd.
Suivons cette expédition au jour le jour.
Date |
Km de l'étape |
Km en cumul depuis Harfleur |
Faits connus
|
8/10 |
|
|
Les 9 000 hommes quittent Harfleur. A 4 km de la ville
l'avant garde Anglaise est attaquée par des troupes
Françaises |
9/10 |
35 |
35 |
Arrivée à Fécamp |
10/10 |
|
|
Campement entre Fécamp et Arques |
11/10 |
60 |
95 |
Arrivée à Arques ou l'armée
Anglaise impose ses conditions : du ravitaillement en nourriture ou la destruction de
la ville. |
12/10 |
33 |
128 |
Arrivée à Eu |
13/10 |
30 |
158 |
Tous les ponts sur la Somme sont détruits par
les Français. Il y a bien le gué de Blanchetacque mais
Henry V y renonce craignant un assaut des Français dans ce
passage dangereux et défavorable. Le convoi est contraint de remonter le
cours de la Somme jusqu'à ce qu'un passage plus sûr soit trouvé. |
14/10 |
27 |
185 |
Campement à Bailleul |
15/10 |
26 |
211 |
L'armée Anglaise essaie de franchir la Somme
à Pont Rémi mais est repoussée par le seigneur de
Wancourt. L'armée continue sa progression et campe à
Hangest sur Somme |
16/10 |
35 |
246 |
Arrivée à Boves. Il faut reconstituer les
réserves de nourriture. En échange de pain et de
vin la ville ne sera pas brûlée. |
17/10 |
20 |
266 |
L'armée Anglaise est à nouveau attaquée. Campement à Corbie |
18/10 |
35 |
301 |
Le soir arrivée à Nesles. Mêmes
tractations avec la ville : des vivres contre l'absence de destruction.
Le village refuse et est finalement brûlé ... |
19/10 |
6 |
307 |
L'armée Anglaise réussi enfin à
traverser la Somme au gué de Voyennes. La traversée prend
toute la journée |
20/10 |
10 |
317 |
Etape au bois d'Athies ou le convoi se repose. Les hommes ont froid et faim et ils sont fatigués par un effort si long. |
21/10 |
11 |
328 |
L'armée arrive sous une pluie battante à Péronne |
22/10 |
|
|
Le lieu du campement est inconnu |
23/10 |
70 |
398 |
Campement à Bonnières. L'armée Anglaise est fatiguée. |
24/10 |
32 |
430 km |
L'armée Française réunie barre la
route à
l'armée Anglaise. Les Anglais campent et tentent de
récupérer car demain à l'aube ... ce sera Azincourt ... |
Remarques sur cette marche spectaculaire :
L'armée Anglaise a accompli un exploit en parvenant
à progresser malgré toutes les difficultés
rencontrées.
La crainte pour un commandement lors de progressions si longues et difficiles est
de voir s'éffondrer le moral des hommes et leur
volonté à combattre.
L'autre crainte est de voir fondre
les effectifs pour causes de maladies et de blessures (hommes et chevaux) ;
mais également pour causes de désertions massives.
Il n'en a apparemment rien été et on peut
éventuellement le comprendre.
Tout d'abord la sévérité des punitions
administrées aux déserteurs était extrème.
Mais dans le cas présent s'agissant d'hommes
venus de leur île sur un continent étranger, auraient
ils pu rejoindre leur pays ( traverser la Manche) sans l'aide et les
moyens de leur propre armée ? Auraient ils pu rester en France
et vivre durablement sur le pays ?
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La Marche de Jeanne d'Arc de "La Chapelle" à la porte Saint Honoré en la journée du 8 septembre 1429
J'ai tenté de présenter l'étude
publiée en 1925 par le chanoine Henri Couget, laquelle se fondait sur
une étude publiée par E. Eude "L'itinéraire
parisien de Jeanne d'Arc en la journée du 8 septembre 1429" dans
la revue des Etudes Historiques de janvier-mars 1916.
Pour cette étude, E. Eude a étudié les textes et chroniqueurs suivants :
- Le Journal d'un Bourgeois de Paris 1411
- Juvénal des Ursins 1411
- Les Vigilles de la mort de Charles VII chronique rimée de Martial d'Auvergne
- Chronique de la Pucelle
- Monstrelet prévot de Cambrai
- Clément de Fauquembergue greffier au parlement
- Jean Chartier historiographe officiel de Charles VII
- Le journal du siège d'Orléans
- Chronique de Perceval de Cagny
Le contexte historique :
Le 6 octobre 1416, à Calais ; le Duc de Bourgogne signe un
accord avec Henri V Lancastre roi d'Angleterre et lui reconnait le
droit à la couronne de France. Il lui promet de l'aider à
reconquérir son royaume.
En 1419, Paris est tenue par les Bourguignons alliés aux Anglais.
En 1420, Charles VI le roi de France est définitivement fou. Le
Dauphin, son fils, est déshérité et Henri V
épouse la fille de Charles VI et devient donc l'héritier
du royaume de France.
La France est alors partagée entre trois influences : le sud de
la Loire (hormis la Guyenne) est fidèle au Dauphin, le
nord-ouest est tenu par les Anglais et le reste est aux Bourguignons.
La même année, en 1422 ; Henri V et Charles VI meurent.
Henri VI fils de Henri V se trouve roi d'Angleterre et de France mais
il est mineur.
En 1429, les Anglais mettent le siège devant Orléans. C'est dans ces circonstances qu'intervient Jeanne d'Arc.
Les armées commandées par Jeanne d'Arc libèrent
Orléans, le fait est exceptionnel et a un retentissement dans
toute l'Europe. Autre événement, la bataille de Patay,
victoire Française qui ouvre les portes de Reims où
Charles VII est sacré roi de France.
A partir du sacre, l'influence de Jeanne d'Arc sur Charles VII faibli et elle perd progressivement son soutien.
Le 26 août, Jeanne d'Arc arrive à Saint Denis avec le but de reprendre Paris.
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L'enceinte de Paris :
Paris était enfermée dans
une enceinte fortifiée. L'enceinte Caroline, commencée
par Etienne Marcel et achevée par Charles V, suivait dans la
zone qui nous intéresse (de la Porte saint Honoré
à la Porte Saint Denis) a peu près le tracé
suivant :
Elle commencait à la Seine vers l'endroit où est aujourd'hui le
pont du Carrousel, traversait la place du Carrousel, la rue Richelieu,
le jardin du palais-Royal, les rues de Valois et des Bons Enfants, la
banque de France, la place des victoires et par la rue d'Aboukir,
rejoignait la porte Saint-Denis.
Sébastian Munster Paris 1550 (extrait)
Les anciens plans donnent une image de ce qu'était cette
enceinte : un mur fortifié de tours et de bastides,
dressé sur une butte de terre et protégé par un
large fossé rempli d'une eau détournée de la
seine. Sur l'autre versant du fossé s'élevait une seconde
butte bordée par un fossé à sec avec un chemin de
contrescarpe sur la campagne.
Au delà, s'étendaient des espaces vagues formant une
légère vallée, à travers laquelle
s'écoulait le "ruisseau de Ménilmontant". Ce ruisseau descendait des
hauteurs de Ménilmontant et de Belleville, et constituait pour
ainsi dire une seconde ligne de défense pour la ville.
Sur la rive gauche entre le ruisseau et l'enceinte, ce n'était
que marais, transformés progressivement en cultures
maraichères.
Par delà le ruisseau, sur la rive droite se dressait au nord la
colline de Montmartre et au nord-ouest s'ouvrait la plaine de Monceau.
Les voies d'accès au nord et à l'ouest
Deux grands chemins traversaient la ville ; l'un du sud au nord par les
rues Saint-Jacques et Saint-Denis aboutissaient à la porte
Saint-Denis ; l'autre de l'est à l'ouest par la rue Saint
Honoré jusqu'à la porte du même nom.
Entre ces
portes il y en avait une troisième, la porte de Montmartre
à laquelle aboutissait le chemin qui descendait de la colline du
même nom.
Voici les principales sorties nord et ouest de Paris. La porte Saint-Denis
menait en passant par La Chapelle à la ville de Saint Denis. A
la porte Saint-Honoré conduisaient deux chemins : d'une par "la
chaussée du Roule" venant en ligne droite du hameau du
même nom et d'autre part "le grand chemin d'Argenteuil"
descendant de ce village par Asnières et la plaine Monceau.
Ces voies hors les murs devaient être sans doute des sentiers
à peu près impraticables aux gros charrois. Entre le
ruisseau et l'enceinte, à travers les marais, nulle voie
n'était possible. Une seule route suffisament
empiérrée se trouvait sur la rive droite du ruisseau de
Menilmontant. Ce chemin reliait la chaussée de Saint-Denis au
grand chemin d'Argenteuil.
Les contingents de l'armée Royale de Charles VII
L'armée Royale commandée par Jeanne d'Arc vint
camper à La Chapelle.
D'autres contingents étaient
répartis en d'autres lieux : à Aubervilliers, à
Montmartre, à Mousseaux (Monceau).
L'armée se composait au dire du Bourgeois de Paris d'au moins 12 000 hommes.
Les contingents défendant l'enceinte de Paris
La ville était tenue par les bourguignons aidés de 200 hommes d'armes Anglais.
La journée du 8 septembre 1429
La veille, le 7 septembre une attaque fut menée contre la ville
on ne sait en quel point de l'enceinte et elle se soldat par un
échec. Il fut décidé de remettre l'affaire au
lendemain. L'armée revint donc camper avec Jeanne d'Arc
à La Chapelle. D'autres effectifs se logèrent à
Aubervilliers, Montmartre, Monceau et villages voisins. L'objectif
était la porte Saint-Honoré. Les divers contingents
rejoindraient le gros de la troupe en cours de route, pour se
rendre ensemble à la Butte dans le voisinage de la porte
Saint-Honoré.
L'enceinte de Paris et la porte Saint-Honoré en 1572 - Braun et Hogenberg (détail)
De La Chapelle partirent une grande quantité de chariots,
charettes et chevaux, tous chargés de bourrées pour
combler les fossés et de claies pour rendre le passage
praticable. Les divers chroniqueurs notent l'importance du
matériel de siège : bombardes, veuglaires,
coulevrines, 650 échelles.
Jeanne se mit en selle vers huit heures du matin et descendit
directement par la chaussée pavée de Saint Denis,
jusqu'à la fourche du chemin d'Auvervilliers où la
rejoignirent les effectifs campés à Aubervilliers.
Continuant sa progression, l'armée longea la clôture de la
léproserie Saint-Lazare qu'elle contourna à angle droit
en empruntant le chemin de Saint-Lazare. Ce chemin vraisemblablement
empiérré longeait sur le côté droit de la
vallée le ruisseau de Ménilmontant, à flanc du
coteau de Montmartre et faisait communiquer "la chaussée de
Saint-Denis" avec le "grand chemin d'Argenteuil". Sur ce chemin
l'armée dut retrouver les troupes descendues de Montmartre
où elles étaient cantonnées.
Grossie de ces nouveaux éléments l'armée poursuivit jusqu'au carrefour du grand chemin d'Argenteuil.
A cet endroit les contingents réunis à Mousseaux (Monceau) rallièrent sans doute l'armée Royale.
L'armée allat alors vers le sud par "le grand chemin
d'Argenteuil" , franchit le ruisseau de Ménilmontant sur un pont
en maçonnerie et arriva hauteur d'une butte non loin de la porte
Saint-Honoré.
Cette porte était difficilement prenable aussi il ne fut pas
décidé de l'attaquer directement mais de porter l'attaque
un peu plus au nord-est contre le mur d'enceinte.
L'armée fut divisée en deux corps, tandis que l'un
commandé par le maréchal de Rais, Gaucourt et Jeanne
devait entreprendre l'assaut ; l'autre sous a direction des ducs
d'Alençon et de Bourbon vint s'embusquer derrière la
Butte pour surveiller une sortie possible par une des portes de
l'enceinte, sortie qui aurait permis de prendre à revers les
assaillants.
En suivant ce parcours entre La Chapelle et la porte
Saint-Honoré ce sont environ 8 km qui ont été
parcourus en environ 4 heures. L'allure moyenne se révèle
faible, probablement du fait de la faible largeur des
chaussées empruntées, du grand nombre de chariots
chargés du matériel de siège et surtout des
ralentissements ou arrêts occasionés par les
arrivées successives des autres contingents.
Vue d'ensemble de la marche de l'armée Royale et de ses contingents
Commencée vers midi, l'attaque se prolongea jusqu'à la tombée du jour.
Successivement la première barrière fut forcée, le
premier fossé sec franchi et le boulevard en contre-escarpe
enlevé.
Mais le second fossé "dans lequel y avait grande eau" opposait
un obstacle sérieux. En voulant le faire combler de fascines
pour pouvoir lever les échelles contre la muraille ; Jeanne fut
blessée à la cuisse. La nuit tombait et le repli fut décidé.
Le lendemain Jeanne d'Arc considérant qu'il fallait poursuivre
l'assaut était prêt à attaquer le rempart rive
gauche de la Seine (quartier Saint-Germain) mais Charles VII donna des
ordres contraires et il faudra attendre encore sept
ans, jusqu'en 1436 ; pour que Paris ouvre ses portes.
Miniature
extraite des "Vigiles de Charles VII - cabinet des mauscrits B.N.
Jeanne au premier plan, entourée de soldats dont certains ,
munis de planches ou fagots de bois tentent de franchir le fossé
en eau qui entoure les remparts de Paris
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L'ICONOGRAPHIE DES ARMEES EN MARCHE
Une illustration de la guerre de 100 ans
Propriétée de la Bibliothèque Royale de Bruxelles
Cette iconographie du XV
ème
siècle illustre les conséquences de la guerre. En haut de l'image
sont représentés des villes et ou château
détruits, brûlés, ruinés. Pour la
population c'est l'exode sur les routes sur lesquelles nous voyons des civils et des militaires.
Sur l'image nous voyons quatre chariots de deux types (à deux ou
quatre roues) tirés par un ou trois chevaux. Ces chariots
servent au transport des civils (femmes et enfants au nombre
de 25 sur l'image) , et des biens matériels (meubles, coffres et paquets).
Les hommes d'armes, sont au nombre de 40. Ils sont tous à pieds avec un
équipement militaire complet.
Ils portent casques, armures de bras, de jambes ou de torse, portent l'épée, la lance
ou un bouclier.
Les hommes civils présentés sont employés à mener les chevaux.
L'armée rejoint des châteaux de montagne
Sur cette miniature est extraite de "La Cité de Dieu"
XVème siècle - Bibliothèque Sainte
Geneviève - les hommes d'armes rejoignent des châteaux de
montagne. Les hommes d'armes font l'ascension avec leur
équipement individuel (haubergeon, jambières, casque,
épée, lance, bouclier. L'illustrateur a bien rendu la
difficulté de telles montées quand on porte dans les 30
kilos d'équipements comme ces hommes (bustes courbés en
avant, raideur de la pente, ...).
Une armée Myceniene sur le départ (1 200 avant J.C.)
Le dessin est peut être fruste mais il ne manque pas de
détails sur les équipements pour cette armée
apparemment sur le départ (casques, cuirasses, grands boucliers,
lances avec ce qui pourrait représenter le paquetage). A
remarquer l'uniformité de ces équipements.
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LE PORT DU (GRAND) BOUCLIER
Le port du bouclier pendant la marche ne pose pas trop de
problème tant que son poids et sa taille restent réduits.
Mais porter le grand bouclier lors des marches est
assurément une difficulté dont nous nous rendons compte à chacune de nos expérimentations.
Les grands boucliers, si utiles au combat pour leur capacité de
protection à distance, sont construits en bois et ont des
dimensions de
l'ordre de 1 m 20 par 0,60 m. Ils pèsent de 6 kilos à 8
kilos.
Les différentes manières de le porter :
Le choix n'est pas illimité. On peut le porter dans le dos,
fixé à l'aide d'une forte lanière (guiche au
moyen-âge) passée en bandoulière en travers du
torse (attesté sur les iconographies).
Cependant, la pratique nous montre que dans ce cas il faut que le
bouclier soit porté haut car sinon son
extrémité inférieure vient au contact des mollets
pendant la marche et ce contact n'est pas supportable sur de longues
distances.
Du fait de le porter haut, il remonte au dessus des épaules ce qui gêne alors
le portage d'objets sur ces mêmes épaules (arme d'hast, perche et
baluchon, etc ...).
Autre solution, le porter sur le côté, contre son flanc ;
maintenu toujours au moyen d'une guiche passée en
bandoulière.
Alors on peut soulager l'épaule supportant la guiche en
soutenant le bouclier d'une main passée dans une poignée
ou sangle fixée en partie basse (le bras étant en
position tendu vers le sol).
Cette aide complémentaire de la main soulage l'épaule et
permet aussi de maintenir en position le bouclier qui sans cela
balotte, glisse et vient battre durant les mouvements de la marche.
Par contre, la position du bras tendu vers le bas peut amener à son ankylosement dans le temps !
Olivier et Laurent durant la première édition de l'Ost en Marche
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Le sujet n'est pas simple et aucune solution n'est pleinement ou durablement satisfaisante.
Chacun cherche sa solution et ce thème à fait l'objet
d'une expérimentation intéressante de la part de
reconstituteurs de la Légion Romaine. En effet, la
société Italienne
pour l'étude de l'Antiquité Militaire a publié
dans le N°1 de son journal, "Vexillum" ; les résultats d'une
expérimentation effectuée par MM. Guiseppe Cascariono et
Ettore Pizzuti .
Cette expérimentation pratiquée sur un parcours varié
de 9 km a été menée avec le grand bouclier des legionnaires : le Scutum de forme concave.
L'expérimentation a eu pour but de valider un systéme de
sangles sur l'existence desquelles il n'existe en fait aucune source.
Mais qui a conduit a trouver une manière fonctionnelle de porter
ce grand bouclier sur le côté (comme
représenté sur la colonne Trajanne par exemple) en
laissant les deux bras et mains libres pour porter le pilum ou
tout autre
objet.
Son principe :
A une sangle posée directement sur l'épaule la plus
proche du bouclier, est fixé en son extrémité
un crochet qui se prend dans la manipule (la poignée en bois qui
permet la préhension du bouclier au combat). La forme appropriée
de ce crochet permet un
décrochetage rapide en cas d'urgence.
A cette sangle est rattaché en travers une seconde sangle qui
fait le tour du torse en passant sous le bras opposé.
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Crochet |
Crochet pris dans la manipule |
Sangles |
Images propriété de Vexillum
Ce double système de sangles empêche la sangle
d'épaule qui supporte la quasi totalité du poids de
bouger et de glisser.
De par sa forme incurvé comme une tuile, le bouclier se cale contre l'épaule, les mains restent libre.
Les deux mains restent libres et peuvent saisir ou porter d'autres objets.
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Le système de sangles |
Vue de dos |
Les mains restent libres |
Images propriété de Vexillum
Benoît durant la première édition de l'Ost en Marche
REALISATION
Tente de protection individuelle et portable
Dans l'antiquité romaine notamment et plus
précisément dans les légions il est fait mention
de tentes collectives pour une dizaines d'hommes. Ces tentes
étaient réalisées en cuir et pesaient un poids tel
qu'elles ne pouvaient être transportées qu'à dos de
mulets ou sur des chariots.
Si l'on s'en tenait donc uniquement aux sources et à
l'archéologie ont dirait que les tentes individuelles
n'existaient pas dans l'antiquité ou que nous n'en avons aucune
trace.
Mais qu'en était il des hommes éloignés du corps du groupe ?
Qu'en était il des éclaireurs ?
Que ce passait il quand le train des bagages ne suivait pas le groupe ?
Au Moyen - Age les premières iconographies
montrant ce que l'on peut raisonnablement interprêter comme
des tentes
individuelles ne datent que du XVème siècle.
Siena Italie 1479
Je me suis donc lancé dans la réalisation d'une tente de
protection individuelle en matière et conception
archéocompatible, fonctionnelle et portable par un homme.
La toile est un rectangle de lin de 180 cm de large et 185 cm de long
à laquelle est cousue un certain nombre d'attaches de piquets en
cuir.
L'originalité de cette tente est d'utiliser comme barre de
faîtage le pilum (cas du légionnaire romain) ou la
lance de choc (homme d'armes médiéval).
Cette barre de faîtage repose sur deux piquets à l'aide d'entretoises d'adaptation en bois.
L'ensemble se range, roulé dans un tapis de sol en laine ; dans
un sac en cuir pour protéger des intempéries.
Le sac pèse 3 kilos et peut être porté en bandoulière ou sur une furca.
FLAVIUS JOSEPH - La Guerre des Juifs - Livre III chapitre 5 et 6
Historien juif ayant vécu en Paléstine au Ier siècle après J.C. - Traduction de René Harmand
Sur l'entrainement des armées romaines :
"En effet, tout d'abord, ils n'attendent pas pour apprendre à
faire usage de leurs armes que la guerre les y oblige : on ne les voit
point se croiser les bras durant la paix pour ne les remuer qu'à
l'heure du danger.
Bien au contraire, comme si ils étaient nés les armes
à la main ils ne cessent point de s'y exercer sans attendre
l'occasion de s'en servir. On prendrait leurs manoeuvres du temps de
paîx pour de véritables combats, tant ils s'y appliquent
avec ardeur. Chaque soldat s'exerce tous les jours de toutes ses
forces, comme si il était en présence de l'ennemi. De
là ce parfait sang-froid qu'ils montrent dans la
mêlée : jamais la confusion ne rompt leur ordre
réglementaire, jamais ils ne se laissent paralyser par la
crainte, ni vaincre par la fatigue ; aussi ne rencontrant jamais
d'adversaires aussi bien entraînés sont-ils toujours
victorieux.
On pourrait dire de leurs exercices que ce sont des combats sans
effusion de sang, et de leurs combats que ce sont des
entraînements sanglants".
Sur le campement :
"En quelque lieu qu'ils portent la guerre, ils n'engagent pas de combat avant d'avoir fortifié leur camp.
L'établissement de ce camp n'est pas livré au hasard et
l'emplacement n'en doit point être accidenté. Ils n'y
travaillent pas tous confusément. Si le sol est inégal,
on commence par l'aplanir ; le tout est enfermé dans un espace
carré. A cet effet, l'armée se fait suivre d'un grand
nombre d'ouvriers et d'outils nécessaires aux travaux de
terrassement.
L'intérieur du camp, divisé par quartiers, est
planté de tentes. La face extérieure offre l'aspect d'une
muraille, garnie de tours à des intervalles réguliers.
Sur les courtines on place balistes, catapultes, pierriers, bref toutes
les machines de trait. Dans l'enceinte s'ouvrent, aux quatre points
cardinaux, autant de portes larges à souhait pour que les
bêtes de somme puissent entrer facilement et les hommes
exécuter des sorties si il y a lieu.
Le camp est parcouru par des rues symétriquement
disposées. Au milieu sont les tentes des officiers ;
précisément au centre s'élève le
prétoire fait en façon d'un petit temple.
On dirait une ville improvisée qui sort de terre, avec son
marché, ses boutiques d'ouvriers, ses sièges de juges, du
haut desquels capitaines et colonels tranchent les différents
qui peuvent survenir.
La fortification, l'installation intérieure, tout est prêt
plus vite que la pensée, tant les travailleurs sont nombreux et
adroits. En cas de besoin, on ajoute au retranchement un fossé
extérieur, profond de quatre coudées et large d'autant.
Une fois à l'abri, les soldats se logent dans leurs tentes par
escouades, avec calme et en bon ordre. Tout le service journalier
s'accomplit avec la même discipline et la même
sûreté : la corvée du bois, la corvée des
vivres, celle de l'eau, le tout suivant les besoins et toujours par
escouades.
La soupe du matin et celle du soir ne sont pas laissées au gré de chacun : tous les soldats mangent en commun.
Les heures de sommeil, de garde, de réveil sont
réglées au son de la trompette : tout s'exécute au
commandement. Dès l'aube tous les soldats vont saluer leurs
centurions respectifs, ceux-ci les tribuns, puis tous les officiers
ensemble se rendent auprès du commandant en chef, et celui-ci
leur donne le mot et les ordres qu'ils doivent communiquer à
leurs sobordonnés.
Dans la bataille tout n'est pas moins réglé. Les
évolutions s'opèrent aussi vite qu'il est
nécessaire qu'il s'agisse d'attaque ou de retraite, toujours la
troupe manoeuvre par unités constituées, au signe des
chefs".
Sur le décampement :
"Si il faut lever le camp, la trompette donne un premier signal. Alors
nul ne demeure oisif : sitôt entendu, on plie les tentes, on
prépare tout pour le départ. Une deuxième sonnerie
ordonne de s'équiper : les hommes chargent les bagages sur les
mulets et les autres bêtes de somme, eux mêmes s'alignent,
prêts à s'ébranler, comme des courreurs
frémissant derrière la corde.
Ils mettent le feu au retranchement, parce qu'il leur sera facile d'en
refaire un autre et pour empêcher que l'ennemi ne puisse faire
usage de celui qu'ils abandonnent.
Enfin, une troisième sonnerie donne le signal du départ
et rappelle ceux qui, pour quelque motif que ce soit, seraient en
retard : car il faut que nul ne manque à son rang.
Alors un héraut qui se tient à droite du
général leur demande par trois fois, dans la langue
nationale, si ils sont prêts à combattre. Trois fois ils
répondent à haute et joyeuse voix : "Nous le sommes
!"
Parfois même ils devancent l'appel du héraut : leurs
clameurs , leurs bras droits levés en l'air disent le souffle
guerrier qui les anime".
Sur la marche et l'équipement des fantassins :
Ils avancent ensuite, marchant avec calme, en bon ordre, sans jamais
rompre leurs rangs, bref, comme s'ils étaient en face de
l'ennemi.
Les fantassins portent la cuirasse, le casque, et un glaive de chaque
côté, celui de gauche beaucoup plus long que l'autre,
lequel ne dépasse pas la longueur d'un empan.
Les soldats d'élite, qui forment la garde du
général, sont armés de la lance et du bouclier
rond, les autres du javelot et du bouclier long. L'équipement
comporte en outre, une scie, une hotte, un pic, une hachette, puis
encore une courroie, une serpe, une chaîne et des vivres pour
trois jours : le fantassin, on le voit est presque aussi chargé
qu'un mûlet de bât.
Sur l'équipement des cavaliers :
Quant aux cavaliers, ils portent une grande épée au
côté droit, une longue pique à la main, un bouclier
long posé en écharpe contre le flanc du cheval, et, dans
un carquois, trois dards ou d'avantage, à large pointe et aussi
longs que des javelots.
Leurs casques et leurs cuirasses sont les mêmes que ceux des gens de pied.
Les cavaliers d'élite qui forment l'escorte du
général sont armés comme leurs camarades de la
ligne".
Sur l'ordre de la marche :
"Vespasien, impatient d'envahir lui même la Galilée,
s'ébranla de Ptolémaïs, après avoir
réglé, suivant l'habitude romaine, l'ordre de marche de
son armée.
Il plaça en tête les Vélites et les archers
auxiliaires, avec la mission de repousser les incursions soudaines des
ennemis et de fouiller les bois suspects, propres à dissimuler
des embuscades.
Venait ensuite un corps de soldats romains pesamment armés, fantassins et cavaliers.
Ils étaient suivis d'un détachement composé de dix
hommes par centurie qui portaient leurs propres bagages et les
instruments d'arpentage nécessaires pour le tracé du
camp. Après eux venaient les pionniers chargés de
rectifier les détours de la route, d'aplanir les passages
difficiles et d'abattre les broussailles gênantes, de
manière à épargner à l'armée les
fatigues d'une marche pénible.
Derrière ceux-ci, Vespasien fit marcher son propre
équipage, et celui de ses lieutenants avec un gros de cavaliers
pour les garder. Il chevauchait ensuite lui-même avec
l'élite de l'infanterie er de la cavalerie, et les lanciers de
sa garde.
Puis venait la cavalerie proprement légionnaire, car à
chaque légion sont attachés cent vingt chevaux ; ensuite
les mulets, portant les hélépoles et les autres machines.
Puis les légats, les préfets des cohortes et les tribuns, escortés de soldats d'élite.
Derrière venaient les enseignes, entourant l'aigle qui, chez les
Romains, conduit chaque légion, parce qu'il est le roi et le
plus brave de tous les oiseaux : c'est pour eux le symbole de leur
suprématie, et, quel que soit l'adversaire, le présage de
la victoire.
A la suite de ces images sacrées marchaient les trompettes
et derrière eux, le gros de la phalange, sur six hommes de front.
Un centurion (par légion) les accompagnait suivant la coutume pour surveiller le bon ordre de la marche.
Derrière l'infanterie venaient tous les valets de chaque
légion, menant les bagages des combattants à dos de mulet
et d'autres bêtes de somme.
En queue de colonne, cheminait la cohue des mercenaires et enfin pour
faire le service de sûreté, une arrière garde
composée de fantassins et d'un bon nombre de cavaliers".
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LES INSTITUTIONS D'ONOSANDER
"Pour servir à l'instruction d'un Général "
Extraits traduits du Grec
"Onosandros" est un philisophe grec ayant vécu au Ier
siècle et à qui il a été demandé ce
traité d'instruction militaire romaine.
Les chapitres traitent de divers thèmes militaires, je ne
rapporte ici que ceux qui intéressent (de près ou de
loin) les armées en déplacement.
Chapitre IV
De la Purification de l' armée
La purification est une
cérémonie sacrée, qui doit précéder
l'ouverture de la campagne. Le général appellera les
Devins et les Prêtres pour la faire.
Elle efface les tâches des coeurs et le soldat purifié fera la guerre avec plus de confiance.
Chapitre V
Des Marches d'une Armée
L'armée doit toujours marcher
en ordre, même lorsqu'elle est éloignée de
l'ennemi, dans son pays ou ailleurs.
On obligera le soldat à garder
ses divisions, ses rangs et ses files ne serait ce que pour
l'accoutumer à cette exactitude.
Elle est surtout nécessaire
lorsque l'on marche dans un pays ennemi, exposé aux attaques
d'un Général entreprenant. Les attaques les plus
légères peuvent porter l'épouvante et renverser
une troupe qui est en désordre.
La disposition de la marche
doit être telle que l'armée puisse toujours être
en état de combattre. Il est en effet essentiel de garder ses
distances, ainsi que d'engager le soldat a être attentif aux
signaux et conventions.
On marchera sur le plus grand (large) front possible pour diminuer la
longueur de la colonne. On choisira le terrain le plus aisé et
le moins sujet aux défilés qui occasionnent toujours du
retard et de la confusion dans la troupe.
Le longueur d'une colonne qui marche sur un front trop petit donne plus
de prise à l'ennemi, qui venant attaquer en tête,
pourra l'envelopper. Il aura le même avantage qu'une armée
rangée en bataille a sur celle de l'ennemi dont elle
déborde les flancs.
Si l'ennemi attaque la colonne en flanc, il parviendra à la
percer et à la rompre. Manoeuvrant pour faire face, elle ne peut
opposer qu'une faible profondeur, vu la longueur.
L'attaque de la queue de la colonne a le même avantage que celle de la tête pour les mêmes raisons.
La grande distance qu'il y a de l'une à l'autre les
empêche de s'entre secourir et souvent l'attaque réussi
avant que le secours soit arrivé.
Il est donc toujours avantageux de faire marcher l'armée sur un aussi grand front qu'il est possible.
La longueur d'une colonne peut occasionner une terreur panique.
Lorsque après avoir passé une montagne, l'avant garde qui
a déjà débouché dans la plaine, voit des
troupes sur la hauteur ; elle peut croire que c'est l'ennemi et prendre
la fuite.
Les équipages et les munitions doivent marcher au centre si on
craint l'ennemi à ses arrières. Les avant et
arrière garde pouvant être attaquées, il est en
général prudent de les composer des meilleurs soldats.
On fera marcher des détachements de cavalerie en avant de la
colonne pour reconnaître, surtout si l'on passe par des
forêts et des pays couverts. cette précaution
empêche l'effet des embuscades que l'ennemi pourrait former.
Il est plus aisé de reconnaître l'ennemi dans un pays
ouvert. Le jour c'est la poussière qui l'annonce, la nuit de
sont les feux.
On doit toujours marcher pendant le jour, excepté dans des cas
d'expédition pressées ou de surprises auxquelles la nuit
est favorable.
La marche lente est nécessaire lorsque l'on s'approche de
l'ennemi en ordre de bataille, car autrement le soldat se fatigue et se
trouve sans force dans le combat.
Le général qui traverse un pays allié, ne saurait
donner des ordres assez sévère pour empêcher le
désordre et le pillage. Rien n'est plus insolent qu'une troupe
de soldats armés à qui l'on a laché la bride. La
vue des richesses est un appas séducteur pour l'homme avide qui
ne raisonne pas.
Une faible raison suffit pour indisposer des alliés et même pour en faire des ennemis.
Lorsque l'armée sera complète et prêt à
marcher, il ne faut pas la retenir dans son pays, ni dans celui des
alliés où elle ne fait qu'une consommation inutile et
couteuse. C'est chez l'ennemi qu'il faut la conduire au plus tôt.
Il fournira, même pauvre, l'entretien nécessaire ce qui est
autant épargné.
Il faut apporter de la sécurité aux marchands qui
fournissent des provisions, soit par mer, soit par terre car ils produisent
l'abondance dans le camp.
Si l'on marche dans un pays serré et montagneux, le
général doit employer des détachements en avant
pour se rendre maître des défilés et des hauteurs :
sans quoi l'ennemi les occupants, il disputerait les passages et
pourrait empêcher l'armée de déboucher.
Chapitre VIII
Des fourages
On doit observer un grand ordre pour faire fourager l'armée.
Le général commandera un corps d'infanterie et de
cavallerie pour couvrir les fourageurs. Pendant que ceux-ci chargeront,
les autres se postant en avant resteront rangés en bataille pour
protéger le fourage et la retraite.
Faute de cette précaution, l'ennemi peut profiter de la
faiblesse de ces gens, détachés du camp sans ordre et
à la débandade ; et empêchés par leur charge
d'user du peu d'armes qu'ils portent, ne peuvent que succomber aux
moindres attaques reglées.
On doiy infliger des peines rigoureuses à quiconque irait fourager sans ordre.
Chapitre XVII
De l'avantage de se procurer des nouvelles de l'ennemi
Un général doit
toujours admettre quiconque vient lui apporter des avis. Il faut qu'il
soit accessible à toute heure du jour et de la nuit ; fut il
à table, au bain ou au lit.
Ceux qui sont d'un abord difficile, par leur refus ou par celui de
leurs domestiques, s'exposent à négliger telle
information qui aurait pu leur être de la dernière
importance et dont le moindre délai empêche
entièrement l'usage.
Chapitre XVIII
Touchant l'heure convenable pour le repas des troupes
Un général fera bien de fixer au camp une heure précise pour la refection de son armée.
Si il est hors du danger d'une attaque, il peut choisir cette heure
indifféremment, mais si sa position ou la faiblesse de ses
retranchements l'exposent à être attaqué
subitement, il est nécessaire que le temps soit fixé le
matin de bonne heure ; afin qu'en cas d'attaque les soldats aient
mangé avant de s'engager.
La bataille pouvant durer jusqu'à la nuit, l'homme à jeun
souffrirait et aurait moins d'aptitude à combattre.
On doit recommander la sobriété sans la pousser cependant
au point de ne pas nourrir assez le soldat. L'excès de la
profusion n'étant pas moins nuisible que celui du besoin.
L'expérience prouve que ce sujet est important.
Chapitre XII
Des ordres de bataille
On doit faire en sorte, dans
l'arrangement de l'armée de réunir les gens d'une
même patrie. L'homme à côté de son
frère, de son ami ou de son voisin, combattra avec plus
d'intérêt et de valeur qu'auprès d'un inconnu.
Les liens de parenté ou d'amitié engagent à se
soutenir mutuellement et à redouter d'avantage la honte et les
reproches qu'entraine la fuite.
Chapitre XXII
Des ordres et des signes pour se reconnaître
Indépendamment de la parole,
on peut se reconnaître à des signes qui se font en mettant
la main ou l'arme dans une position particulière. Ces signes
peuvent être multipliés à l'infini soit par le
bruit des armes ou par des gestes convenus afin qu'en cas de
mêlée, le soldat puisse distinguer son ami d'avec son
ennemi, autrement qu'à la parole qui peut avoir
été surprise ou achetée.
Cet usage est essentiel lorsque l'armée est composée de
diverses nations qui ne comprennent pas leurs différentes
langues réciproques et n'ont d'autres moyen que de se
reconnaitre par des signes.
On doit les donner même à ceux qui restent dans le camp,
afin de les garantir de toute surprise ou tentative par ruse.
Chapitre XXV
De la propreté réquise dans les armes
Il est important que le soldat tienne ses armes propres et en état.
C'est une bien légère peine que d'aiguiser l'épée, de polir le casque et la cuirasse.
Dans un jour d'action, le poli des armes peut éblouir l'ennemi et lui en imposer.
Chapitre XXXI
Les connaissances d'astronomie sont utiles à un général
Lorsqu'il s'agit de quelque entreprise contre l'ennemi à
exécuter la nuit, la connaissance du ciel est absolument
nécessaire au général.
Quelle que soit l'action à engager dont l'heure doit être
précise pour que l'on agisse de concert en dedans et en dehors
d'une place afin que l'un ou l'autre ne soit point découvert et
l'entreprise manquée.
Le lever d'un astre sur l'horizon est un signe invariable dont on peut convenir.
On peut aussi connaître exactement la distance que l'on doit
parcourir et le temps que cela exige en se réglant sur le lever
des astres.